vers le site de Delcourtune biographie de Turfvers la bibliographie de Turfvers des photos de Turfvers une vidéo de Turfdes interviews de Turfdu blabla sur Turfl'histoire de la Nefles personnages de la Nefdu blabla sur la Nefles clins d'oiel des albumsdes trucs à savoir..d'autres BD dessinées par Turfdes crayonnésles projets de Turfdes planches non éditéesdivers trucs..la collection Turfles exlibris de la Nefdu Turf en 3Dles dédicaces de Turfle tome 5 en avant premièreles dernières infosvers le site de gribouillisl'email du webmaster, et non celui de Turfhome sweet homedes fonds d'écran à téléchargerun concours avec des affiches à gagnerun petit quizzle forum pour poser vos questionsdes liens !vers le site bédéthèque pour laisser votre avisce qui a changé sur le site depuis la dernière fois

Interview 08, première partie.

La première partie de l'interview s'est faite 'Au Bureau', une sorte de pub anglais, qui fait des pizzas. Ensuite, on s'est rendu chez lui, et on l'a fini... ...dans sa cuisine !

Quatre tomes et 1 hors série en plus de 10 ans. la Nef avance doucement. Pourquoi est ce si lent ?
C'est lent parce que je travaille lentement, que je suis perfectionniste, et que les idées ne viennent pas forcement au moment où je suis à ma table. Une page de la Nef, c'est 50 heures de boulot, c'est-à-dire, pratiquement tous les jours de la semaine. Et il faut trouver des idées, et mon boulot à moi, c' est de trouver des idées que les autres n' ont pas eu. Et comme j'ai un petit cerveau, et pas un QI exceptionnel, c'est difficile. En plus de ça, je ne dessine pas forcément très bien, j' écris pas non plus très bien : écrire les dialogues prend du temps, jusqu' à ce que je trouve la bonne formule. Pour le dessin, c'est pareil, dès fois, ça marche, dès fois, ça ne marche pas. Là où j'arrive à gagner encore du temps, encore que la technique est assez longue, c'est pour la mise en couleur.

Comment s'organise une journée type de travail ?
Je me réveille, c'est déjà pas mal. Ça dépend de où j'en suis sur la page, au niveau création. Si j'ai un scénario à écrire, j'attend devant ma feuille et j'écris des dialogues jusqu' à ce que ça me convienne. Aucune journée ne se ressemble réellement. Ce que j'aime, c'est faire des dialogues et des précrayonnés le soir, comme ça, quand je me réveille, j'ai déjà des bases de travail. Démarrer le matin à froid, c'est très difficile. Quand j'étais jeune auteur, et que je n'avais pas d'enfant, je me levais, et déjà sous la douche, la machine à réfléchir se mettait en marche, dès que j'étais habillé, je fonçais à ma table, j'avais pleins d'idées, et je faisais mes pages. Maintenant, ça fonctionne autrement, je me lève, j'amène ma fille à l'école, je ne me mets pas à ma table qu'au bout d'une heure et demie, et là, il faut que la motivation vienne. C'est différent.

Du fait que les albums s'étalent sur une longue période, quand tu feuillettes les premiers albums de la Nef, y a-t-il des éléments que tu aimerais modifier au niveau du scénario ? et du dessin ?
Au niveau du scénario, oui, il y aurait 2 ou 3 trucs à régler, mais je peux le corriger par la suite, je peux changer l'histoire au fur et à mesure, et ainsi corriger les erreurs du début. Graphiquement, dès que j'ai fini une case, j'ai envie de la refaire. Est ce que je serais capable de reprendre tous les dessins de la Nef avec la même énergie que j'avais il y a 10 ans ? Ca serait peut-être mieux dessiné, mais moins joli. On peut arriver à corriger un dessin, mais pas l'élégance et la spontanéité qu'il y avait à l'époque.

Peux tu nous résumer les différentes étapes de construction d'une planche ?
D' abord écrire des dialogues, puisque je sais ce que je dois raconter. C'est assez long, je peux en écrire 3 ou 4 pages, pour en tirer 10 lignes. Une fois que j'ai fait les dialogues, je commence un pré découpage, et je cherche des idées graphiques qui vont venir en plus, qui vont me donner envie de faire cette page et de passer 40 heures derrière ma table de dessin. Après, c'est une longue recherche de cases. Si je n'arrive pas à dessiner ce qui était prévu, je change, je reviens à la première étape et je réécris les dialogues pour trouver autre chose à raconter.

Est-ce que tu as un exemple précis de choses que tu n'arrivais pas à dessiner, et que tu as été obligé de modifier ?
Des morceaux d'anatomie, un mouvement que je n'arrivais pas à faire, et sur lequel je m'entête pendant 2 jours. Dès fois, je l'ai trouvé, mais je ne m'en rends pas compte. Je continue à faire des dessins, il y en a des bons, mais je n'arrive plus à savoir lequel est le bon. Je ne change pas forcément l'histoire, mais je change le cadrage, je fais le dessin en silhouette mais des fois ça ne marche pas.

Réalises-tu planche après planche sans jamais revenir sur celles-ci. Ou au contraire il t'arrive de regretter et de refaire une case après avoir fait les suivantes ?
Non! Sur la Nef, quand je refais une case, c'est tout de suite. Je suis rarement revenu en arrière, sauf sur le tome 2 où j'avais laissé des pages en suspend, et je les ai faîtes après. Mais sur Gribouillis que je fais actuellement, je n'ai refait que 3 petites cases, c'est pas énorme.

Si on compare avec les premiers albums, le dessin a un peu changé.
Le dessin a évolué, c'est certain. Au début, je découvrais les personnages au fur et à mesure, je ne les avais pas étudié, et quand j'ai su les faire, ils ont continué a évoluer aussi par les dédicaces : le dessin devient plus spontanée, mais il faut éviter de tomber dans ces facilités.

Est-ce que la construction de tes histoires a aussi évoluée ?
Pour le scénario du tome 1, j'avais fait un chemin de fer, c'est-à-dire, j'avais décomposé l'album en 46 cases, qui correspondaient aux 46 pages, et j'avais écrit les éléments importants du scénario dans ces 46 cases. J'ai suivi ce chemin de fer avec quelques transformations en cours de route quand même, mais j'ai arrêté de faire ça. Maintenant, j'avance au fur et à mesure.

Et au niveau de ta technique de dessin ?
Ma technique de dessin a évoluée, parce que j'ai utilisé l'aérographe pour faire certains éclairages et les effets à partir du tome 3. Ca change pas mal de choses : avant quand je remplissais une case couleur, je ne mettais pas de caches sur les personnages, donc je faisais un fond, qui passait parfois sur des personnages, donc les personnages avaient parfois la couleur du fond, bon, ça ne se voyait pas, parce que je savais faire ça, mais depuis qu'il y a l'aérographe, ça aide pas mal. Mais j'évite qu'on voie que c'est de l'aérographe. La technique de dessin a évoluée aussi, parce que j'ai plus l'habitude, je fais moins de rustines (note : trous dans la planche de dessin sur lequel on colle un nouveau dessin qui rattrape des erreurs), je sais ce qu'il ne faut pas faire : avant je faisais des corrections à la gouache sur un personnage qui était fait à l'encre, cela ne se voyait pas à l'œil nu, mais le scanner le voyait bien, et les corrections ressortaient un peu grises.

Les albums Delcourt sont de 46 pages, abandonnes tu des idées à cause de cette limitation ?
Non, en fait on est même content d'arriver à la 46 ième page. Je n'abandonne pas des idées, mais j'en oublie pas mal. Parfois, 5, 6 ans après, je retombe sur des pages de scénario que je n'ai jamais intégré à l'histoire, et qui manquent. Par exemple, dans le tome 3 ou 4, il y avait une rencontre entre la Reine et le prince Putatif : La Reine va en parler dans le tome 5, mais j'aurai bien aimé que cette séquence existe réellement dans le tome 4, mais j'ai oublié de la faire.

Peut-on envisager de retrouver les scènes manquantes dans un tirage de tête, au moins sous forme écrites ?
Sous forme dessinée ? Oui, j'aimerai bien faire ça.

Des collages apparaissent dans les planches de la Nef des Fous _pour les tableaux dans le tome 1, et notamment dans le Petit Roy_ N'y a-t-il pas des problèmes lors de l'impression de la planche ?
Il y a des problèmes quand on reproduit la quadrichromie, à cause des effets de trame un peu bizarres. Sinon, au niveau de l'ombre portée, soit je m'arrange pour qu'elle n'y soit pas, soit au contraire pour qu'on la voie.

De plus en plus de BD utilise l'ordinateur, ne serait ce que pour les couleurs. Te sens-tu attiré par l'ordinateur en tant qu'outil de travail ?
J'ai été déçu par le résultat des rares BDs pour lesquelles j'ai fait faire les couleurs par ordinateur, je n'aime pas le résultat, c'est trop plat, même si les coloristes ont vraiment bien travaillé, ça ne va pas avec mon dessin. Ensuite, je n'aime pas du tout rester assis pendant des heures devant un écran, parce que la technique de l'ordinateur me dépasse. Troisièmement, j'aime beaucoup faire la couleur à la main. Et pour tout ce qui est collage, bricolage de petit textes, je préfère me débrouiller en trouvant une autre technique : utiliser une photocopieuse par exemple. J'aime ces petits bricolages que je fais sur mes pages, j'aime bien l'original trafiqué, qui n'est plus à plat mais en 3 dimensions, parce que j'ai collé quelques choses par-dessus.

Dans le Petit Roy, quelques planches y recourent, mais est-ce que tu l'as déjà utilisé sur les autres albums de la Nef ? Si non, l'utiliseras-tu dans les albums à venir?
A priori non, sauf cas de force majeure : c'est arrivé à Thierry Robin (note : dessinateur de Rouge de Chine et de Koblenz chez Delcourt), qui avait envoyé sa couverture à Paris, et que la poste avait pliée, si un jour ça m'arrive, je demanderais à ce qu'on corrige le pli par informatique.

L'univers de la Nef des Fous tient à la fois de la Steam Punk (note : technologie à vapeur du début du XX ième siècle) (la nef, ses robots, son créateur) et de la fantasy (l'extérieur de la Nef). Apprécies-tu ces genres littéraires? Si oui, as-tu des auteurs préférés?
J'ai lu Le Seigneur de Anneaux quand j'avais 12, 14 ans, je crois que c'est la seule chose que j'ai lue en fantasy. Au niveau Steam Punk, mise à part la série TV de 1972, L' Ile Mystérieuse, il n' y a rien d'autre. Bien sûr, il y a l'univers de Jules Vernes.

Une des caractéristiques de la série, c'est l'absence d'un véritable héros. Les personnages sont pourtant tous assez attachants. Quel est celui que tu préfères?
J'aime bien Clément, j'aime bien Baltimore, j'aime bien Ambroise, parce qu'il est facile à dessiner, j'aime bien Chlorenthe quand j'arrive à la dessiner, je les aime tous, autrement, j'en aurai pas fait autant. Même les schloumfs, je les aime bien.

Allons nous un jour connaître le prénom du Sergent dans la Nef ?
Non, ce n'est pas utile. Il y a un mystère, c'est comme ses yeux, on ne les verra jamais. Bon, on les a déjà vu dans le tome 1, mais après, on ne les verra plus. Ce n'est pas important. C'est comme Baltimore, il n'a pas de grade.

Est ce que tu penses qu'après avoir visité l'extérieur de la nef, Chlorenthe et Arthur auront envie de rentrer ?
Il y a de fortes chance pour qu'ils reviennent à l'intérieur de la nef, est ce qu'ils en ont l'envie ? Je ne sais pas.

Pour dessiner le château de Clément, as tu pris comme base un château existant ?
Non, c'est construit volume par volume, c'est à dire, une tour, c'est un cylindre coiffé d'un cône un peu déformé, le tout accroché à un cube, prolongé d'un carré. Je n'ai pas fait de plan, car le château est tellement immense, que si je devais travailler avec plan, je serais encore sur le tome 2, voir même sur le tome 1.

De nombreux éléments architecturaux d'Eaux Folles sont inspirés du courant artistique de l'Art Nouveau. On pense entre autres à l'entrée du grand théâtre, à l'affiche de La Kallas et à de nombreux éléments de mobilier (la chaise et la table du cabinet du grand coordinateur dans le premier tome), qui font fortement penser aux oeuvres de Horta, de Mucha ou de l'Ecole de Nancy... Apprécies-tu particulièrement cette période? T'es-tu basé sur des créations existantes ou s'agit-il d'inspirations personnelles?
J'aime beaucoup cette époque là, je travaille rarement avec de la documentation. Par exemple, les chaises et tables de la séquence où le Grand coordinateur est devant plusieurs écrans télévisés dans le tome 1 sont vraiment issues de mon imagination, et à mon avis, ce sont des meubles qui ne pourraient pas exister, qui ne tiendraient pas debout.

Certains objets, notamment les véhicules, ressemblent à de vieux jouets. Est-ce que tu travailles avec de la documentation ou tout est fait de mémoire ?
Pour les véhicules de la Nef, les sculpteurs qui ont essayé de faire le sidecar se sont aperçus que l'objet n'avait pas d'équilibre, qu'il partait vers l'arrière. Je dessine donc des trucs qui ne sont pas possible. Les véhicules sont fait de volumes rajoutés les uns aux autres. Souvent, je leur fais des phares de 2 chevaux, ça leur donne tout de suite un petit côté vieillot avec des calendres à l'ancienne. J'ai vécu au dessus d'un garage pendant 20 ans, en face d'une voie ferrée, et toute ma documentation vient de mes souvenirs. Parfois, quand je trouve que je dessine un peu toujours la même chose, j'ouvre un bouquin, je dessine un pare-choc ou autre chose, et puis, c'est bon, c'est rentré dans ma banque de donnée, il n'y a plus qu'à construire de nouveaux véhicules avec.

Peux tu nous raconter comment t'es venu l'idée des rayures et des pois rouges ?
Les rayures c'est très simple. Dès les premières pages de la Nef que j'ai dessinées, j'ai commencée par la page 2 du tome 1, on voyait le roi se lever, monter les escaliers, et rencontrer un garde. Le garde était habillé en rouge, et le roi en blanc, mais on ne voyait que le garde. J'ai pensé qu'il faudrait du rouge pour le roi, mais je n'allais pas lui faire une chemise de nuit rouge, je lui ai donc fait une chemise de nuit blanche avec des rayures rouges. Ca lui a tout de suite donné un caractère fort. Pour les pois, dès la page 10, je me suis dit que j'allais m'intéresser aux motifs dans la Nef : le chien avait des taches, le roi des rayures, le carrelage au sol avait des motifs bizarres, le monstre d'Eaux Folles avait aussi des taches sur la peau, et j' ai continué à trouver des motifs pour différentier chaque personnage, parce qu' un jour, je compte faire une planche où l'on ne verra personne, où on ne verra que les motifs, mais on saura qui est dans la case, car on reconnaîtra le motif.

Les Schloumpfs, plagiat ou hommage ? Plus sérieusement, pourquoi avoir fait une référence aussi directe aux schtroumfs de Peyo ?
C'est un hommage aux schtroumfs bien entendu. J'ai grandi avec ça, j'ai même cru jusqu' à l'âge de 10 ans que ça existait, cru ou espéré que ça puisse exister. A l'extérieur de la nef, j' ai eu besoin de monstres assez terrifiants pour faire peur à mes propres monstres, graphiquement, ça devenait très difficile à représenter, j' ai décidé de prendre le contre-pied en prenant des personnages plutôt sympathiques, et comme les schtroumfs étaient libres…

Les albums de la Nef des Fous sont-ils traduits en plusieurs langues ?
Elle fût traduite en Hollandais, mais l'éditeur a coulé. Elle fût traduite en allemand, mais l'éditeur a coulé, mais il y a en un nouveau qui a repris. Le Petit Roy n'a pas été racheté, parce que c'est trop compliqué à traduire : il y a trop de textes et de typographies différentes.

Tu es guitariste, mais le thème de la musique est très rare dans La Nef. _ à part Alligator de Thiéfaine, et la Kallas_ Est ce que tu dessines en musique ?
Je dessine et j'écris en musique. J'écoute un peu de hard rock quand je suis fatigué, beaucoup de classique pour le scénario : des Avé Maria quand le scénario doit être un peu triste. Des chansons française à textes, au rock français hard, voire rock alternatif. Il n'y a pas de techno et pas de jazz. En rock français, la liste est longue : en ce moment, il y a Dionysos, dont j'adore les textes et l'énergie sur scène, les Wanpas pour la même chose, bien que les textes soient beaucoup plus simples. Autrement Noir Désir, Téléphone, Starshooter pour la même époque, les Satellites, les VRP. Et pour les chansons à texte, il y a bien sûr, Renaud, Brassens et Brel.

 

retour aux interwiews